Les tambours de la guerre résonnaient à mes oreilles et le désir de venger les attaques contre mon peuple animait mon cœur d’une ardente vigueur, mais j’étais pieds et poings liés. Mes prétentions vengeresses, bien que ne répondant pas à une soif personnelles mais à des considérations plus pratiques, m’avaient attiré les foudres de Kathia, notre Voix de Damnatur, éminente Shaman et de Sellyra, qui m’avait pourtant intronisé Célétila quand j’étais plus jeune. Des voix venant du peuple même s’élevaient contre mon désir de ne pas laisser impunies, on me menaçait moi de punitions et on me prêtait toutes sortes d’ambitions et de folies, alors que nous venions une fois de plus de subir une attaque sous les traits d’une fausse Marever ! La plus aboutie jusqu’à ce jour, comprenant une diversion et du fait d’un Darshanide capable de m’imiter à la perfection. Je n’aurais pas été distrait par ces imbéciles de plantons, propres à rien, que cette aberration ne serait jamais arrivée.
Plus le temps passait et plus j’envisageais sérieusement de mener mon propre combat en quittant Minoc, ne pouvant résolument pas tourner le dos à mes convictions ni sombrer dans la violence et la vulgarité comme mes détracteurs.
Alors que je rentrais de patrouille je croisais un frère guerrier que je n’avais encore jamais vu, d’une prestance rare et couturé de cicatrices récoltées dans maintes batailles. Rokk était son nom et bon était son cœur, bien qu’il tempérait mon caractère enflammé et impétueux il prêta une oreille compréhensive à mon point de vue, ce qui fit que Sellyra, nous surprenant en pleine fraternisation, s’immisça dans notre discussion, amère et nous quitta en laissant à nos pieds sa toque de cerf. Rokk la ramasse, souhaitant que ce triste évènement débouche sur quelque chose de positif.
Mon frère guerrier, autrefois un grand chef de guerre, me proposa de procéder à une patrouille frontalière afin de vérifier si les Darshanides abandonnaient enfin leur projet d’interdire le passage aux étrangers à leur peuple. Nous progressions prudemment, sous le couvert des arbres et masqués par le bruissement du vent dans les feuilles, craignant malgré tout une perfidie des demi-Dämans.
Nous avions passé au crible toute la vallée, partageant parfois de brefs échanges avec les soldats des postes avancés. Toutefois, notre dernier point d’observation nous incitait à la prudence, les sentinelles semblaient nerveuses, elles effectuaient leur ronde comme si elles redoutaient une attaque, les chevaux étaient lourdement harnachés et de temps à autre un ordre fusait pour resserrer les rangs des quelques hommes d’armes présents.
Satisfaits de ce que nous avions vus dans la vallée, nous décidâmes de passer au loin, juste histoire d’être vus pour signifier clairement que ce lieu était ouvert à tous. Encore aujourd’hui je n’ai pas compris quelle erreur ou provocation nous avons pu commettre.
Un ordre plus appuyé déchira le silence pour se répercuter contre le flanc de la montagne, les archers s’alignèrent alors que les spadassins mettaient le pieds à l’étrier. A peine avions-nous stoppé nos montures qu’une première volée fusait à nos oreilles et lorsque nous pûmes détaler, ce fut dans l’angoisse d’être frappés d’un trait acéré et talonnés par les guerriers lancés à notre suite.
Finalement, connaissant mieux la région, nous sommes parvenus à distancer nos poursuivants dans la forêt avant de regagner Minoc.